Violiste, Răzvan Popovici est l’initiateur et le directeur du festival SoNoRo dédié à la musique de chambre. Quelques mots d’un musicien passionné…
Vous dirigez le festival SoNoRo depuis quinze ans. Comment avez-vous réussi à toucher un public fidèle et aussi large ?
Dès le début, SoNoRo a su atteindre son public de manière organique, à travers un mélange intelligent d’artistes de renom, de salles et d’espaces spectaculaires pour nos concerts, et un répertoire varié et ingénieusement choisi, le tout réuni dans un concept cohérent et élégant. Je crois que le secret de notre succès a été la patience de créer une communauté qui nous suit attentivement et reste dévouée, et ce grâce à un monde musical distinct, passionnant et riche. Nous avons stimulé sa curiosité, nous l’avons surprise avec un esprit ludique inattendu, et nous lui avons toujours offert un peu plus que ce qui était initialement prévu. L’idée est de présenter ce que les spectateurs attendent de nous, mais aussi de les surprendre. Ainsi, chaque année, nous avons gagné de nouveaux fans qui viennent aux concerts de SoNoRo parfois sans prendre en compte les noms des artistes à l’affiche ou le répertoire choisi, juste parce qu’ils sont sûrs de passer un moment inoubliable.
Faut-il une éducation, une certaine culture musicale pour comprendre la musique de chambre ?
La musique de chambre, comme tout autre genre musical, est accessible à tous. Mais je pense que l’intimité créée dans un espace plus restreint entre les quelques musiciens sur scène et un public moins nombreux offre une opportunité précieuse de ressentir la musique à son niveau le plus intense. Sa vibration, sa puissance illimitée, l’échange d’énergie entre artistes et auditeurs rendent la musique de chambre extrêmement exaltante. C’est une expérience rare à notre époque. Et par musique de chambre, je n’entends pas seulement un quintette pour piano de Brahms ou un quatuor à cordes de Beethoven, mais aussi un trio avec le pianiste Brad Mehldau, l’ensemble de Roby Lakatos, ou encore Pink Martini.
Quand avez-vous réalisé que votre passion pour la viole allait devenir votre métier ?
Au début, je n’éprouvais aucune véritable passion pour la viole. Ce sont mes parents, musiciens eux aussi, qui m’ont montré le chemin et m’ont aidé à faire mes premiers pas vers cet instrument. J’ai alors commencé à le maîtriser, à jouer dans divers ensembles ou orchestres, et à gagner de l’argent grâce aux concerts. Puis, tout en développant de nouveaux moyens artistiques, je me suis rendu compte que la viole était la voie à suivre, ma vraie passion dans la vie. À ce moment-là, j’étais déjà à mi-chemin d’une carrière musicale qui fonctionnait. Il est extraordinaire de pouvoir transformer sa passion en un métier. Lorsque ces deux choses sont congruentes, on peut continuer à apprendre et à progresser. La satisfaction provoquée par la conscience de ces progrès est un sentiment d’une valeur inestimable.
Propos recueillis par Matei Martin.