Les plages roumaines de la mer Noire s’agrandissent. Nicușor Buzgaru, expert au sein de la compagnie Apele Române et manager du projet, fait le point sur cette entreprise d’une ampleur sans précédent d’un coût total de 840 millions d’euros – dont 85% en provenance de l’Union européenne…
En quoi consiste ce projet d’extension des plages du littoral ?
Le projet d’élargissement de la côte, qui comporte deux phases, vise à réhabiliter et à protéger le sud du littoral roumain, entre le canal Edighiol-Periboina et la commune de 2 Mai, soit une longueur totale de 30,5 km. Il inclut de vastes travaux d’ensablement, des travaux hydrotechniques, à savoir la construction de digues, ainsi qu’un volet portant sur la biodiversité, particulièrement important pour la mer Noire dont les écosystèmes ont été très affectés ces derniers temps. Ce volet vise l’implantation d’espèces pérennes qui y vivaient jadis, telles que la Zostère marine, appelée aussi herbe de mer – une plante essentielle qui fixe le carbone et permet l’oxygénation de l’eau, ndlr –, ou encore différents bivalves (mollusques, ndlr). Nous envisageons également la mise en place de récifs artificiels qui vont pour leur part favoriser la prolifération d’espèces menacées, dont le bivalve bioluminescent, le seul de ce type vivant dans les eaux roumaines de la mer Noire.
Où en sont les travaux et quel procédé technique utilisez-vous ?
Dans le cadre de la première phase, qui comprend cinq lots, l’élargissement de la plage de Mamaia est quasiment achevé, le projet est en cours de réception. Suivra la plage de Tomis Cazino, où il s’agira uniquement de protéger la côte, sans ensablement. Il y a un mois, les travaux ont également commencé à Eforie, où les digues anciennes et dégradées seront démantelées et remplacées par des digues plus modernes, tandis que la plage sera ensablée sur 5,5 km. Le procédé d’ensablement est relativement simple, mais les équipements et le savoir-faire sont complexes. On utilise une drague aspirante-refoulante pouvant stocker entre 12 000 et 16 000 mètres cubes de sable. Elle est équipée d’un bras qui extrait le sable au large, dans une zone approuvée, et le décharge via un conduit, car la drague risque de s’enliser si elle se rapproche trop de la côte. Ce conduit mesure 2000 mètres. Pour vous donner une idée, à Mamaia, il a fallu décharger 4,3 millions de mètres cubes, soit 6 millions de tonnes de sable. À Eforie, il s’agira de 4,5 millions de mètres cubes. Il est prévu que le projet dans son ensemble, seconde étape comprise, se termine en décembre 2023.
Les résultats sont-ils déjà visibles ?
Certainement. La plage de Mamaia a connu l’élargissement le plus important, soit 200 mètres. Le projet prévoyait au départ un élargissement allant de 60 à 100 mètres, mais des études ont constaté qu’il fallait aller jusqu’à 200 mètres pour assurer un ensablement uniforme, sur toute la durée de vie du projet qui est de 50 ans, sachant que le sable a tendance à migrer vers le nord. Cette plage a complètement changé, l’espace gagné est très vaste. Nous ne retournerons plus à la situation d’avant, où les constructions temporaires semblaient s’entasser sur le sable.
Propos recueillis par Mihaela Rodina.