Regard grandit. Plus de pages, davantage de reportages en Roumanie et au-delà des frontières, une nouvelle maquette. L’an passé, nous avons rénové notre site, et amélioré la distribution de la revue qui est disponible sur l’ensemble du pays et dans de nombreux lieux à Bucarest, en supplément des kiosques Relay Inmedio et des abonnements. Quant à la rédaction, elle comprend désormais autant de journalistes français que roumains francophones. Des journalistes qui savent observer sans juger, écoutent, sentent les réalités avec humilité et clairvoyance. Parce qu’être le plus objectif possible, c’est possible, la noblesse de ce métier est là : transcrire la complexité du monde de façon limpide, précise et juste. Sans fioritures, sans élans lyriques, sans la prétention de se croire écrivain. Etre journaliste, point barre. Alors que les plateformes de l’expression instantanée ont envahi nos espaces, que les regards subjectifs pullulent sans prendre le temps d’analyser vraiment, sans prendre le temps de se demander si ça vaut la peine d’écrire, la place au grand reportage, au grand entretien nous semble plus que jamais nécessaire. La place au temps, à la respiration, comme l’écrit si joliment mon amie et collègue Isabelle Wesselingh dans sa chronique page 19. Peut-être que ce besoin de recul ira-t-il en s’amplifiant. Les supports à la périodicité longue, bien édités, semblent prendre un nouvel essor. Regard s’inscrit évidemment dans cette démarche. Ceci étant, la presse écrite dans son ensemble ne se porte pas bien, ici et ailleurs. Car elle est face à plusieurs dilemmes : proposer un média gratuit ou payant ? Etre toujours plus interactif et embrasser le rythme effréné imposé par les réseaux sociaux ou temporiser ? Abandonner le format papier ou le garder ? Intégrer davantage les commentaires et vidéos du public ou les différencier clairement des articles ? Sans doute faudrait-il reprendre les choses à la base, redonner du sens à ce que l’on diffuse, et surtout, ne pas oublier l’essentiel : trop d’infos tue l’info.
Laurent Couderc (mars 2014).