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Entretien réalisé dans la semaine du lundi 16 juin, par écrit et en roumain (depuis Cluj-Napoca).


L’inflation roumaine reste préoccupante. Gabriela Bodea, professeure d’économie à l’université Babeş-Bolyai de Cluj-Napoca, éclaire sur son mécanisme…

Quelles sont les causes de l’inflation en Roumanie ?

En mai dernier, la Banque nationale annonçait un taux d’inflation de 5,45 %, soit une nouvelle hausse par rapport à avril. Le dernier rapport sur l’inflation, toujours du mois de mai, prévoit également une trajectoire inflationniste en augmentation jusqu’à la fin de l’année. Pour ce qui est des causes, elles sont claires : la hausse du prix des carburants et de certaines denrées alimentaires. Cette seconde cause est notamment la conséquence de la sécheresse de l’été dernier. Des prix élevés engendrent une réduction du pouvoir d’achat, malgré la croissance des salaires par rapport à l’indice de productivité du travail, laquelle est accentuée par des facteurs de risques puisant leurs racines au niveau économique mais aussi politique. Ces facteurs sont d’ordre interne : l’impact des mesures fiscales-budgétaires correctives, la nécessité d’une consolidation budgétaire dans le contexte d’un déficit excessif, la dynamique des prix de l’énergie et des denrées alimentaires déjà mentionnée, sans oublier le problème de l’absorption et de l’utilisation des fonds européens qui a des conséquences sur le développement économique et donc sur le pouvoir d’achat. Mais il y a aussi le contexte international actuel, l’évolution des économies de l’UE par rapport à l’économie mondiale, la montée du protectionnisme commercial un peu partout, la guerre en Ukraine, et bien sûr la situation au Moyen-Orient. J’ajouterais qu’afin de minimiser l’inflation, il ne faut pas oublier que la Banque nationale doit aussi être capable de contrôler étroitement la masse monétaire en circulation ainsi que l’évolution des prix.

Dans quelle mesure l’économie informelle favorise-t-elle l’inflation ?

Précisons d’abord qu’elle est en baisse par rapport à la dernière décennie. Même si elle est toujours, chez nous, bien plus importante que la moyenne européenne vu qu’elle représente environ 28 à 30% du PIB national. Le phénomène est lié à la corruption et à l’immoralité fiscale. D’un autre côté, notez que très souvent, plus le degré d’imposition augmente, plus l’économie informelle prend de l’ampleur et fait alors baisser le PIB par habitant. C’est un cercle vicieux car cela affecte le niveau de vie et accentue les dépenses de l’État. En termes monétaires, l’économie informelle privilégie l’argent liquide et contribue ainsi au blanchiment des capitaux. Alimentée par des revenus non déclarés, la masse monétaire augmente artificiellement ainsi que les pressions inflationnistes. Un État qui n’est pas capable de prélever efficacement l’impôt contribue inévitablement à l’aggravation de l’économie souterraine. Cependant, encore une fois, au-delà d’un certain seuil, trop de fiscalité peut avoir un effet contre-productif.

Est-ce que des secteurs comme la restauration profitent de la situation pour gonfler artificiellement leurs prix ? 

Avec un accès limité au financement, des investissements parfois lourds, un personnel pas forcément spécialisé mais exigeant des salaires de plus en plus élevés, les contraintes qui pèsent sur certaines petites entreprises sont réelles. Et, pour générer des profits, elles essaient de répercuter leurs coûts de production, souvent fixes, sur le consommateur en augmentant leurs tarifs sans réel fondement. Le secteur de la restauration tente là de trouver des solutions face à une concurrence de plus en plus forte. Il a également dû composer avec la taxe sur le pourboire – depuis 2023, ndlr. Censée rapporter des recettes supplémentaires au budget de l’État, cette taxe n’a guère eu le succès escompté de ce point vue-là, d’autant qu’elle a suscité des réactions négatives et représenté un coût administratif supplémentaire de mise en conformité pour les acteurs économiques. Par ailleurs, les Roumains sont des clients particulièrement exigeants qui attendent un service personnalisé, bien que les produits proposés ne soient pas toujours d’une qualité vraiment supérieure. Particulièrement en vogue, la livraison à domicile s’inscrit dans cette tendance. Il semblerait qu’un produit bien emballé d’un point de vue marketing et vendu à un prix relativement élevé soit du goût d’un public dont le temps est devenu la variable la plus importante. Le secteur ne fait là que répondre aux demandes des consommateurs.

Propos recueillis par Benjamin Ribout (16/06/25).

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