Diana Vasiliu, psychologue, se penche sur les relations amoureuses des Roumains et leur évolution récente…
Comment l’institution du mariage a-t-elle évolué en Roumanie ?
Sans m’en référer à des statistiques officielles, je dirais que de nos jours, on continue à se marier, sans pour autant s’empresser de le faire. Je fonde ma réponse sur mon expérience de psychologue dans une grande ville comme Bucarest. À la différence d’il y a quelques décennies, aujourd’hui le mariage se justifie plutôt pour des raisons pragmatiques que romantiques ; les enfants, les crédits, les investissements… D’un autre côté, vu que le divorce n’est plus autant stigmatisé, on serait enclin à penser que les couples se séparent plus vite. Mais ce n’est pas vraiment le cas. Dans le milieu urbain surtout, de plus en plus de couples cherchent à réparer leurs relations avant de lâcher l’affaire. Parce que de toute façon, la dynamique sociale fait que les couples, notamment ceux avec enfants, sont contraints de coopérer même après le divorce.
Comment les couples gay sont-ils perçus ?
Encore une fois, je précise que mes propos s’appliquent uniquement au milieu urbain, éduqué, car dans les campagnes, la situation est bien différente. Précision faite, même si les couples gay existaient déjà avant, ils n’ont commencé à devenir visibles que récemment. Ceci dit, désormais, former un couple gay n’est plus trop un problème, la société est devenue relativement tolérante. Surtout que l’actuelle génération de jeunes est très ouverte, et elle finira par imposer ses points de vue aux générations antérieures, qu’elles le veuillent ou non. Aujourd’hui, ce que l’on désigne par le terme de normalité se décline sous plusieurs formes.
Quelle place les réseaux sociaux et les applications de rencontre occupent-ils dans la vie amoureuse des Roumains ?
Je constate une ouverture de plus en plus grande envers ce type de socialisation, notamment à une époque où le travail occupe le plus clair de notre temps. L’actuelle pandémie, à force de privilégier le travail de chez soi, a réduit les possibilités de trouver un partenaire. Du coup, ce type de socialisation devient une véritable solution. Malheureusement, à force de créer des liens virtuels, on brûle des étapes, notamment le prélude affectif qui précède une relation amoureuse. Or, il s’agit d’une période nécessaire, quand les potentiels partenaires sortent de leur zone de confort et commencent à se découvrir, à s’observer, à tâtonner avant de former un couple. L’expérience relationnelle virtuelle risque d’annihiler le courage nécessaire pour sortir de notre bulle afin d’assumer de nouvelles expériences. Car les réseaux sociaux permettent de prendre la fuite sans donner d’explications.
Propos recueillis par Ioana Stăncescu.