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Entretien réalisé le mercredi 25 juin dans l’après-midi, par téléphone et en roumain.


Dans un contexte économique compliqué, le politologue Andrei Ţăranu décrypte les chances de réussite du nouveau gouvernement roumain dirigé par Ilie Bolojan…

Le nouvel exécutif compte mettre l’accent sur la réduction du déficit public qui tourne autour de 9% du produit intérieur brut. D’un autre côté, les besoins dans le domaine social restent grands en Roumanie, et si rien n’est fait en termes de politiques publiques, les leaders extrémistes pourraient revenir en force d’ici quelques années. Qu’en pensez-vous ?

D’une certaine façon, ce que préconisait George Simion – leader du parti extrémiste AUR et candidat malheureux à l’élection présidentielle de mai dernier, ndlr – pour réduire le déficit budgétaire, à savoir limoger 500 000 fonctionnaires, ne diffère pas beaucoup de ce que prévoit le gouvernement actuel, même si les chiffres évoqués ne sont pas les mêmes. Je ne pense donc pas qu’une telle mesure pourrait stimuler le mouvement souverainiste. Si vous regardez les analyses sociologiques réalisées par les instituts INSCOP et CURS, vous observerez que les votants d’AUR sont surtout des employés de petites entreprises familiales, des gens qui habitent en milieu rural ou dans de petites villes de province, ou encore des Roumains de la diaspora en colère contre l’État roumain. Loin d’être dérangées par d’éventuelles coupes visant les fonctionnaires publics, ces personnes vont exulter. En revanche, ce qui pourrait encourager le retour des souverainistes, ce serait l’incapacité des autorités à expliquer les politiques qu’elles comptent adopter.

Vu la configuration actuelle du gouvernement et la mise en place, une nouvelle fois, d’un système de rotation du Premier ministre, êtes-vous optimiste quant à son succès sur les deux, trois prochaines années ?

Le gouvernement vient à peine d’être installé et je veux garder mon optimisme. Certes, le risque qu’il ne mène pas à bien son mandat existe et, selon moi, ce risque vient surtout de l’intérieur, de la nature des rapports au sein de la coalition au pouvoir. L’un des projets de loi débattus au Sénat ces jours-ci, portant sur un retour à l’élection des maires à deux tours, a ainsi donné lieu à une première fissure ; l’USR a voté pour, tandis que le PSD, le PNL et l’UDMR ont voté contre. Il faut se rendre à l’évidence, ces trois partis n’aiment pas l’USR, qui a sa part de culpabilité. Les choses sont donc compliquées et des tensions vont sans doute éclater à un moment donné entre ces formations. En outre, le PNL de M. Bolojan est en passe d’absorber des petits partis de centre droit, dont le PMP et Forţa Dreptei, ce qui va affaiblir l’USR.

Pensez-vous que le président Dan sait exactement ce qu’il veut faire de son mandat ? Et si oui, est-il possible qu’à terme il ait les moyens d’accomplir son plan ?

Pour l’instant, le président n’a pas fait état d’un plan, d’un programme politique clair. Et vu qu’il a gardé la plupart des conseillers en politique étrangère de ses prédécesseurs, il est évident qu’à cet égard, il ne va pas susciter de révolution ou modifier la ligne de conduite de la Roumanie. Or, la situation internationale d’aujourd’hui ne ressemble plus à celle d’il y a cinq ou six ans. D’énormes mutations sont intervenues, et si l’on maintient à leurs postes les mêmes personnes, on ne peut s’attendre qu’à une inertie dans ce domaine. Prenez l’Union européenne… Elle a connu des changements majeurs ; les Patriotes pour l’Europe – d’orientation nationaliste et souverainiste, ndlr – et les Conservateurs et réformistes européens (eurosceptiques, ndlr) représentent la deuxième force politique au Parlement européen, tandis que la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, est visée par une motion de censure déposée par les souverainistes. Tout cela pourrait provoquer des scénarios inattendus auxquels il faudra bien s’adapter. Je mentionnerais ensuite les relations avec le président américain Donald Trump. Il est évident qu’elles ne sont plus les mêmes que du temps de Klaus Iohannis – le précédent chef de l’État roumain, ndlr –, et que la Roumanie est toujours dans une sorte de quarantaine, alors qu’on ignore, par exemple, ce qu’il adviendra de la base militaire de Mihail Kogălniceanu. Le pays a donc besoin d’une politique intérieure et étrangère reflétant tous ces changements. J’espère que M. Dan prendra ses marques et annoncera bientôt des mesures qui définiront son mandat, en le différenciant de ses prédécesseurs.

Propos recueillis par Mihaela Rodina (25/06/2025).

Note :

Mercredi, le gouvernement d’Ilie Bolojan a annoncé les mesures fiscales qu’il comptait mettre en place, certaines dès le 1er août. Elles concernent notamment une augmentation de la TVA dans plusieurs domaines (ndlr).

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