Directrice artistique de Art Encounters Timișoara, Diana Marincu décrit le potentiel de la scène artistique de la prochaine capitale européenne de la culture, et évoque les difficultés mais aussi l’énergie du secteur indépendant…
Cet automne, la Biennale Art Encounters va présenter sa quatrième édition. Comment cette initiative s’est-elle développée depuis 2015 ?
Je dirais de manière organique, à partir d’une initiative indépendante du collectionneur et entrepreneur Ovidiu Șandor, rejointe par la ville de Timișoara qui a activement soutenu le projet. Le point de départ, en 2015, a été la recherche menée par deux admirables commissaires d’exposition, Nathalie Hoyos et Rainald Schumacher, qui se sont consacrés à cartographier la scène artistique roumaine en relation avec la région, et avec les changements socio-politiques depuis 1989, réunissant un nombre impressionnant d’artistes de différentes générations. À partir de là, notre mission est aujourd’hui de faire vivre une plate-forme de dialogue pour l’art contemporain qui soit un moteur culturel pour la ville, et de créer un climat artistique de coopération entre les différents secteurs culturels. Actuellement, la Fondation Art Encounters dirige le projet « L’art en action » (Arta în Acțiune, ndlr) qui comprendra deux expositions internationales : « Je ressens quelque chose, je ne sais pas quoi » (I feel something, don’t know what, ndlr), organisée avec la galerie nationale d’art Zachęta de Varsovie, et l’exposition « La troisième femme » (The Third Woman, ndlr), réalisée avec la galerie Charim de Vienne. En parallèle, comme vous l’indiquiez, la Fondation prépare la Biennale Art Encounters 2021 qui se déroulera du 1er octobre au 14 novembre. Intitulée « Our Other Us », cette édition envisage deux concepts d’exposition proposés par Mihnea Mircan et Kasia Redzisz en rapport avec le contexte de la pandémie, et qui s’intéresse à explorer l’empathie et la responsabilité en tant que valeurs guidant notre existence.
Précisément, quel est l’état émotionnel des artistes tel qu’il est transposé dans leurs œuvres récentes ?
La situation des artistes est certainement précaire, mais il est encore trop tôt pour faire un bilan des changements reflétés dans leur art. Leur statut souffre d’un manque de considération de la part de l’État à travers le ministère de la Culture, qui a lamentablement échoué dans la création d’un cadre de soutien. Et au niveau local, les autorités sont complètement dépassées par les priorités concernant la lutte contre la pandémie.
À quoi ressemble la scène des arts visuels à Timișoara, désignée Capitale européenne de la culture en 2021 (date reportée à 2023 à cause de la crise sanitaire, ndlr) ?
C’est toujours une grande joie de voir l’énergie investie par les artistes pour créer de nouvelles plates-formes dédiées aux arts visuels à Timișoara. La scène indépendante est devenue, ici comme à Cluj, le principal moteur des changements. Récemment, il y a un certain nombre d’espaces d’artistes qui sont apparus, comme par exemple Faber, Kunsthalle Bega ou Indecis. Et aussi des initiatives plus anciennes, telles que le festival Simultan, ou encore des projets dédiés à l’éducation et à la formation, comme le fait l’association Contrasens. Sans oublier la galerie Jecza qui a su créer des liens avec le marché international de l’art, ou la Fondation Triade. La liste est longue. Il y a un tas de collègues et d’amis qui se consacrent héroïquement à des projets culturels malgré la période difficile que nous traversons.
Propos recueillis par Matei Martin.
Fondation Art Encounters : https://artencounters.ro/en/home-en/
Biennale Art Encounters : https://2021.artencounters.ro/en/home_en/