Entretien réalisé le samedi 19 novembre dans la matinée, par téléphone et en roumain.
Eleonora Vlad est présidente et fondatrice de l’Association Bruno Shelter. Dans cet échange, elle explique le rapport des Roumains avec leurs animaux domestiques…
Quelle est la tendance des abandons d’animaux domestiques en Roumanie ? La crise économique actuelle accentue-t-elle le phénomène ?
De façon générale, les Roumains ne considèrent pas leurs animaux domestiques comme étant importants. Les chiens ou les chats sont facilement remplaçables, puisque très nombreux dans les rues. Ici, les gens ont du mal à comprendre que l’animal a lui aussi des sentiments, qu’il peut avoir peur, qu’il peut stresser ou souffrir. Le chien, notamment à la campagne, est censé apporter un bénéfice à son maître ; sinon, il risque d’être abandonné, délaissé. La crise économique actuelle ne fait qu’accentuer les abandons. Faute de ressources, les familles cherchent à supprimer toute dépense supplémentaire. Et malheureusement, les chiens ou les chats sont souvent considérés comme des objets ; l’affection qu’ils apportent n’est pas vue comme un bénéfice réel.
Dans les campagnes comme dans les villes, les chiens sont souvent laissés à l’extérieur, on ne s’en occupe pas trop. Faudrait-il sensibiliser davantage sur les besoins de l’animal ?
Effectivement, un chien délaissé par sa famille, attaché au fond du jardin avec peu d’interaction humaine finira plein de puces, d’eczéma, et donc répugnant pour son maître qui ne voudra plus de lui. Et si le chien ne meurt pas, on l’abandonnera. C’est la raison pour laquelle il y a toujours des meutes de chiens qui errent dans les villages, ou dans les forêts proches des habitations. Ces chiens deviennent sauvages, ils chassent et sont agressifs. Il faudrait les capturer, les héberger et les préparer pour l’adoption. Mais rares sont les autorités locales prêtes à financer de telles démarches, ou à sensibiliser les gens aux besoins de leurs animaux. Et quand la volonté existe, il y a peu de moyens. Exemple, dans le département de Giurgiu, la police des animaux, qui travaille auprès de la mairie de Giurgiu, ne dispose que de quatre à cinq agents pour tout le département.
Quelle est la situation dans les chenils ? Font-ils face à une surpopulation ?
La situation est dramatique et la surpopulation est inquiétante. Dernièrement, l’Autorité pour la surveillance et la protection des animaux de Bucarest (ASPA, ndlr) s’est mobilisée et a mis en place des campagnes de stérilisation gratuite des chats errants de la capitale, ainsi que des foires d’adoption. Je salue la nouvelle direction d’ASPA qui a changé d’attitude. En 2013, cette même autorité s’était félicitée d’avoir euthanasié des milliers de chiens errants en bonne santé. Désormais, la loi en vigueur dans le domaine ne permet l’euthanasie que sur des animaux malades, tout comme elle interdit aux propriétaires de chiens de laisser leurs animaux se reproduire. La stérilisation, vaccination et identification électronique des chiens sont également obligatoires. Seuls les éleveurs agréés de chiens de race ont le droit que leurs animaux se reproduisent.
Propos recueillis par Ioana Maria Stăncescu.