Le déblocage de la crise politique pourrait suivre le congrès du PNL qui a lieu aujourd’hui, et celui d’USR-PLUS prévu le week-end prochain. Analyse des pronostics avec le politologue Cristian Pîrvulescu, doyen de la Faculté des sciences politiques de l’École nationale des études politiques et administratives (SNSPA)…
La coalition au pouvoir peut-elle encore être sauvée ?
Dans la situation actuelle, la coalition gouvernementale ne peut plus fonctionner. Tant que Florin Cîțu restera Premier ministre, USR-PLUS ne reviendra pas au pouvoir, quels que soient les résultats des deux congrès. Pour USR-PLUS, qui a clairement posé ses conditions, la seule solution serait de proposer un nouveau Premier ministre. Et il y a des signes qui indiquent que ce scénario est envisagé par le PNL. Reste à voir quelle sera la légitimité des nouvelles directions de ces partis.*
* À lire ou à relire, notre second entretien avec le sociologue Sebastian Lăzăroiu sur cette même crise politique (précédente édition du 11 septembre) : https://regard.ro/sebastian-lazaroiu-2/
La motion de censure USR-PLUS/AUR contre le gouvernement sera-t-elle votée ?
Tout dépend de la décision de la Cour constitutionnelle. Il y a trois possibilités. La première est que la décision soit favorable au gouvernement, la motion ne sera alors pas débattue. Or, dans sa composition actuelle, la Cour est plutôt pro parlement, et ce serait la première fois qu’elle prendrait une décision ne favorisant pas le parlement par rapport aux autres institutions. La deuxième option serait de rendre justice au parlement, ce qui conduirait donc à un débat sur la motion. Et la troisième, celle de rendre une décision salomonique donnant raison tant au gouvernement qu’au parlement. Au final, tout dépendra de la direction du parlement, ce qui signifie que la motion ne sera probablement plus discutée.
Personnellement, j’ai tendance à croire que cette motion ne sera effectivement pas débattue, ce qui serait une première, et conduirait à une autre décision de la Cour sur l’interprétation de l’alinéa de la Constitution lié aux changements dans la composition du gouvernement. Par ailleurs, la position récemment adoptée par le PNL, par la voix de Florin Cîțu, est qu’il n’y aura de toute façon pas besoin d’un nouveau vote de confiance pour le gouvernement. L’objectif du PNL est aujourd’hui de faire pression sur l’alliance USR-PLUS afin qu’elle revienne au gouvernement, sans céder le poste de Premier ministre.
Mais USR-PLUS ne peut pas se soumettre à cette pression, son électorat la sanctionnerait. D’un autre côté, je ne pense pas que l’électorat USR-PLUS ait ressenti la collaboration avec AUR comme une trahison idéologique. Ceci étant, cette union de circonstance a sûrement sorti AUR de son isolement.
Les conséquences de tout cela se verront lors des élections de 2024. Si USR-PLUS résiste jusque-là, elle aura le temps de regagner des voix en fonction de sa capacité à désigner un candidat valable pour la présidence du pays. Sinon, les élections de 2024 pourraient bien être les dernières pour USR-PLUS.
Le PNL pourrait-il proposer un autre Premier ministre que Florin Cîțu ?
Il y a des candidats au poste de Premier ministre, dans la mesure où le PNL s’accorderait avec le président pour débloquer la situation. En tant que président du PNL, Florin Cîțu pourrait ensuite assumer un autre poste, par exemple celui de président du Sénat. L’un des ministres actuels deviendrait alors le nouveau Premier ministre. Mais cela signifierait que le poste de président du Sénat soit délaissé par Anca Dragu, d’USR-PLUS, ce qui opposerait davantage les deux formations. Dans tous les cas, rien ne se fera avant la fin du congrès d’USR-PLUS et la décision finale de la Cour constitutionnelle concernant la motion de censure. Nous sommes encore dans une période où les choses restent très floues. Pour rappel, tout est parti de la décision très aventureuse du Premier ministre de limoger le ministre de la Justice. La question est de savoir si Florin Cîțu l’a renvoyé afin de s’assurer de la mise en place du programme Anghel Saligny** et de la loyauté des maires libéraux, ou tout simplement afin de retirer USR-PLUS du gouvernement. Quoi qu’il en soit, au final, la variante du maintien d’un gouvernement minoritaire reste aujourd’hui très probable.
Propos recueillis par Carmen Constantin.
** Programme national d’investissement dans les infrastructures du pays d’un montant de 50 milliards de lei (environ 10 milliards d’euros) qui s’étalera sur sept ans.