Cristian Diaconescu est ancien ministre de la Justice et des Affaires étrangères. En ce début d’année mouvementé, il fait part de son opinion sur le Brexit, les relations transatlantiques, la Chine…
Quel impact le Brexit aura-t-il sur l’Union européenne et sur la Roumanie en particulier ?
Le Brexit a été une mauvaise nouvelle aussi bien pour la Grande-Bretagne que pour l’Union européenne. Concernant la coopération à venir, je pense que les deux parties vont comprendre qu’elles doivent trouver des formules cohérentes afin de développer des relations qui répondent à leurs intérêts respectifs, qu’il s’agisse du marché et des échanges commerciaux ou de sécurité et de défense. Dans le domaine de la politique étrangère, de la sécurité et de la défense, les relations entre Bucarest et Londres ont été particulièrement bonnes ces dernières années, et nous avons tout intérêt à préserver ce partenariat, à lui donner chair, tant sur le plan bilatéral qu’au sein de l’Otan (*). Dès lors que durant une longue période nous avons été en plein accord avec la Grande-Bretagne, je suis confiant que la réponse britannique sera à la hauteur.
(*) L’Organisation du Traité de l’Atlantique nord est une alliance politico-militaire de sécurité collective créée en 1949. Elle comprend aujourd’hui 30 pays membres, ndlr.
Quid des relations entre l’Union européenne et la Chine, et de la Chine avec les États-Unis. Le départ de Donald Trump change-t-il vraiment la donne ?
L’Union européenne et la Chine ont signé fin 2020 un accord d’investissements. Au-delà de la situation compliquée générée par le Covid-19, on ne saurait occulter les réalités économiques et stratégiques. La Chine est le premier producteur mondial de biens, et si au premier semestre 2020 la question de délocaliser une partie du secteur manufacturier s’est posée, il est devenu évident qu’un tel projet serait difficile à mettre en œuvre. Les intérêts chinois en Europe sont nombreux, des États dont la Grèce, l’Italie ou l’Allemagne ont des relations économiques étroites avec ce pays. Du coup, je ne pense pas qu’il y aura des changements brusques majeurs. La position de Washington non plus ne bougera pas après le départ de Trump. Il ne faut pas oublier que le congrès américain voit avec une grande réticence les projets chinois aussi bien commerciaux que dans le domaine de la sécurité, que ce soit en mer de Chine méridionale, ou concernant Hong Kong et Taïwan. Les approches des deux pays sont très différentes, je ne pense pas que cela change avec l’administration Biden. De fait, les relations avec la Chine seront un dossier important dans les efforts visant à revigorer le partenariat transatlantique. Il est clair que les États-Unis souhaiteraient que l’Union européenne soit plus solidaire à cet égard.
À quels défis la Roumanie sera-t-elle confrontée en 2021 ?
Cette année sera marquée par une renégociation des schémas de coopération, de sécurité et des partenariats économiques à un niveau global. Nous vivons dans un monde interdépendant et la Roumanie doit user de ses atouts pour être une présence active et reconnue sur le plan international. Elle ne pourra certainement pas être absente sur des dossiers concernant le partenariat oriental, la République de Moldavie, l’Ukraine, la Géorgie, la mer Noire, les Balkans occidentaux et, pourquoi pas, concernant des zones où elle est traditionnellement vue comme un partenaire de dialogue et de négociations, à savoir le Proche-Orient. Bucarest ne doit pas attendre ; les plaques tectoniques des relations internationales sont en train de se réajuster, l’issue de ce processus aura des conséquences à long terme.
Propos recueillis par Mihaela Rodina.